Après des réformes illégitimes et réactionnaires, maintenant des hauts cris sur les dépenses publiques… qui annoncent de nouvelles coupes dans le budget ! Pendant ce temps, la crise du recrutement s’aggrave, des postes ne sont pas pourvus et nos métiers sont mis à mal. Si nous constatons quelques reculades (mise en pause de la réforme du brevet, réduction des programmes de SES en terminale, réduction budgétaire sur le PACTE…), la rentrée 2024 prolonge la dynamique des années précédentes. Vous trouverez dans cette publication le premier bilan qu’en tire la CGT Éduc’action pour les lycées généraux et technologiques.
Prépa seconde : À peine lancée, déjà enterrée ?
Parmi les multiples mesures réactionnaires du « Choc des savoirs » figurait l’obligation d’obtenir le DNB pour entrer en seconde, à travers la création d’une classe « prépa-seconde ». En cette rentrée, une seule classe « pilote » devait être ouverte par département pour les élèves volontaires. Mais même cet objectif peu ambitieux n’a pas été atteint : dans plusieurs départements aucune classe n’a été ouverte faute d’élèves. Dans les autres, les rares élèves sont là essentiellement car ils·elles n’ont pas eu d’affectation en seconde, y compris des élèves ayant obtenu le DNB. Si l’on ajoute à cela l’absence de programme, le faible volume des heures disciplinaires (20 heures) et une organisation très floue des enseignements, avec notamment 7h d’enseignements « méthodologiques et préparatoires à la seconde GT ou pro », cette classe ressemble plutôt à une salle d’attente pour les élèves non affecté·es.
Mi-septembre, plus de 13 800 élèves étaient encore sans affectation. La « prépa-seconde » ne peut être une réponse acceptable au manque de places en seconde.
Cette mesure de tri social a connu son premier recul : elle est annoncée « gelée » par la ministre démissionnaire Belloubet. Pour la CGT Éduc’action, ce n’est pas suffisant : elle doit être retirée .
Stage de seconde : quel bilan ?
Aucun bilan n’est encore tiré et le ministère se fait particulièrement discret sur le sujet. Le seul chiffre à ce jour nous est donné par Ouest France le 30 août pour l’académie de Poitiers qui « évite la catastrophe avec 2/3 des élèves ayant trouvé un stage ».
Outre l’aspect « quantitatif », ces stages posent plusieurs problèmes de fond : reproduction sociale dans les choix de stage, absence d’objectif pédagogique, peu de lien avec les aspirations des élèves dans leur orientation. Cette mesure est inutile. Il faut l’abandonner.
Bac technologique STMG…
Depuis la rentrée 2023, les choix d’orientation en STMG ne sont plus prioritaires. Dans le même temps, le ministère incite les académies à fermer des sections de ce bac technologique. Ainsi, des élèves ayant reçu un avis favorable du conseil de classe du 3e trimestre pour aller en 1ère STMG se sont vu refuser une affectation. Cette politique n’a pas même été discutée dans les établissements pour préparer l’orientation en classe de seconde et les conseils de classe. On leur a alors proposé trois hypothèses :
- Une affectation en 1ère STMG dans un autre lycée (en général plus éloigné) disposant encore de places.
- Une affectation dans une autre filière technologique de l’établissement (en général un second ou troisième choix de l’élève).
- Un redoublement .
Pour les familles et les élèves, l’annonce en plein mois de juin s’est avérée violente, d’autant qu’aucune communication particulière n’avait été faite pour alerter sur ce risque.
L’objectif est clairement de réduire la voilure des sections STMG, pas assez « insérantes » pour le ministère, alors que cette série technologique est la plus demandée par les élèves.
Que faire du nouveau programme d’EMC en seconde ?
En cette rentrée, changement de programme pour l’Éducation Morale et Civique en seconde. L’EMC devrait avoir pour objectif de former les citoyen·nes aux problématiques actuelles de la société.
Malheureusement, ce programme sert plus ou moins ouvertement de vitrine à l’idéologie libérale du gouvernement, que ce soit par la référence au SNU ou par la volonté d’accoler systématiquement la responsabilité à la notion de liberté.
Si on compare anciens et nouveaux programmes, la question des discriminations disparaît en seconde (et sera vue en 1ère). Pourtant celles-ci sont plus que jamais présentes et elles parlent beaucoup aux jeunes.
Il n’est jamais trop tôt pour réfléchir à ces questions pour pouvoir combattre ces discriminations, lever les idées fausses, etc. Ce ne sera plus le cas. À la place seront abordées entre autres les notions d’État de droit, de sécularisation, de hiérarchie des normes, d’ordre public… Il faut aussi revenir sur la question des moyens.
Aujourd’hui, les grilles fixent royalement 18h annuelles pour l’EMC, ce qui dans les faits se traduit par un cours d’une heure par quinzaine en classe entière (avec une moyenne nationale de 30 élèves par classe) .
Pire, le programme proposé est tout bonnement intenable. Sa première partie (en 6h) doit comporter une approche historique de l’État de droit, l’étude d’une décision du conseil d’État et de la loi de 1905, l’État avec un point plus précis sur la laïcité à l’école, une recherche documentaire sur les droits des femmes et la maîtrise de la fécondité et enfin une étude de cas sur la question pénitentiaire en lien avec les décisions des Cours européennes de Strasbourg et du Luxembourg. Au-delà du côté irréaliste de la chose, c’est vraiment la prime au saupoudrage si on veut s’y mettre sérieusement… Cerise sur le gâteau, on aurait pu attendre que ces nouveaux programmes s’accompagnent de documents d’accompagnement.
Las, le ministère affiche tranquillement sur son site que ceux-ci sont en cours de production…
Dommage l’année a déjà commencé…
Pacte pour la rentrée 2024, c’est toujours non !
Le bilan du Pacte s’avère, sans surprise, loin des promesses de rattrapage salarial et encore plus éloigné des promesses de lutte contre les écarts salariaux hommes/femmes.
Selon la Depp, 34% des enseignant·es ont signé un Pacte lors de la dernière année scolaire ; dont 48% dans le privé et 23% dans le public. La priorité a été mise sur les remplacements de courte durée, RCD (17% des enseignant·es) et le dispositif Devoirs faits au collège (9%). Ce qui confirme notre analyse selon laquelle l’objectif premier du Pacte est d’augmenter le temps de travail. Les chiffres du ministère corroborent aussi cette analyse : le nombre d’enseignant·es effectuant des heures supplémentaires a augmenté en moyenne de 15% depuis 2015.
Sur le fond, le ministère n’a rien communiqué. On sait juste qu’à peine la moitié des remplacements ont été faits par un·e enseignant·e de la même discipline que l’enseignant·e absent·e.
Dans un contexte de politique d’austérité, l’avenir de ce dispositif est incertain. Déjà l’année dernière Bercy réclamait 700 millions d’économie dans l’Éducation nationale ; ce qui correspond au budget dévolu au Pacte en 2023. Mais, même si le budget global de l’Éducation Nationale était reconduit à l’identique, donc sans prendre en compte l’inflation, cela serait largement insuffisant. Même Belloubet en a convenu .
Déjà, les Rectorats annoncent des baisses drastiques du nombre d’HSE (souvent une baisse de 50% voire plus) et du nombre de parts de Pacte, en contradiction avec les annonces de la ministre démissionnaire…
Mais ce n’est pas la première incohérence du Ministère !
Rappel
La CGT Éduc’action continue de s’opposer aux dispositifs comme le Pacte, qui fracturent nos professions par la multiplication d’indemnités spécifiques. Ce Pacte vise en priorité à effectuer des remplacements de courte durée à des fins d’affichage politique (un·e enseignant·e dans chaque classe) sans aucune efficacité pédagogique. Il est temps de remettre des moyens supplémentaires pour l’attractivité de nos métiers et la juste rémunération des personnels. Cela passe par une augmentation indiciaire de tou·tes et sans contrepartie, mais aussi des moyens pour réduire les effectifs des classes.
Terminale : Allègement des programmes de SES
Après une année au rythme intenable en 2024, le ministère a annoncé supprimer trois chapitres au programme de SES pour le Bac 2025. Si un allégement était nécessaire, il s’est fait sans aucune concertation. De plus, c’est un choix idéologique qui supprime les chapitres les plus critiques (sur les inégalités sociales, les crises économiques et l’École) et qui intéressaient le plus les élèves.
La CGT revendique la mise en place d’un groupe de travail formé d’une majorité de professeur·es de lycée pour refondre un programme de SES avec un angle pluraliste et la prise en compte des enjeux environnementaux.
91,4% des candidat·es ont été admis·es au bac toutes filières confondues, un chiffre qui atteint 96,1% en série générale. En tendance, ce taux de réussite en filière générale a augmenté de 13 points de % entre 2004 et 2024.
Concernant les mentions, 68,7% des candidat·es dans la voie générale ont obtenu une mention et 38,2% obtiennent une mention « Bien » ou « Très bien » en 2024. Sur le moyen terme, on observe une forte augmentation du taux d’obtention des mentions.
La hausse de ces taux de réussite et d’obtention des mentions n’est pas un problème en soi si elle se traduit par une réelle démocratisation et une possibilité effective pour les lycéen·nes de poursuivre leurs études sur des filières choisies.

Déconnexion entre programmes et niveau évalué
Des programmes, la plupart du temps pléthoriques, que les collègues peinent à finir, sont finalement évalués avec des exigences souvent faibles (tant en termes de maîtrise des connaissances que de méthode et de maîtrise de l’écrit) ; les consignes en réunion d’harmonisation suscitent d’ailleurs des débats de plus en plus conflictuels.
Ces injonctions contradictoires renforcent lassitude et sentiment de perte de sens du métier. Cette situation n’est pas totalement nouvelle, cependant les réformes Blanquer ont achevé le bac comme diplôme permettant de valider le passage dans des filières choisies à l’université. Les lycéen·nes en ont en partie pris conscience, les véritables enjeux se jouent sur Parcoursup d’où l’explosion des contestations de notes au quotidien et la baisse d’énergie qu’ils∙elles consacrent à la préparation du bac. Les lycéen·nes sont poussé·es à réfléchir en permanence à leur orientation au détriment des apprentissages. Les notes sont essentiellement des instruments de sélection dans le supérieur plutôt que de validation de maitrise des apprentissages. Face au foisonnement d’informations, le cadre institutionnel pousse aussi les élèves à adopter des stratégies « par cœur », de contournement voire même à recracher des contenus Tiktok dans le cas du grand oral.
Baisse des exigences en lien avec l’abandon des services publics
La baisse des exigences s’inscrit dans une démarche globale d’abandon des services publics par les gouvernements néolibéraux.
N’oublions pas que le nombre d’heures par élève a baissé ces dernières années.
Face à ce nouveau rapport aux apprentissages créé par les réformes du bac, la solution n’est pas la mise en place de filières sélectives et le renforcement d’une École à 2 ou 3 vitesses au sein même du lycée public.
Il est possible d’avoir un bac exigeant et des taux élevés de réussite en mettant les moyens humains et en sortant du stress permanent de la sélection. Cela nécessite de changer de cap idéologique et pédagogique.
La CGT Éduc’action revendique pour les lycées :
- Abrogation des réformes du lycée, Parcoursup et de l’accès sélectif à l’enseignement supérieur
- Suppression du contrôle continu au profit d’épreuves terminales nationales.
- Suppression du Grand oral
- Des moyens à la hauteur des besoins pour le lycée
- Mise en place d’un lycée unique polytechnique